« Pour être le meilleur, il faut s’entrainer avec les meilleurs. » « Ne choisis pas de sparring facile. » « Entrainement difficile, guerre facile. » Les affirmations ci-dessus, répétées en boucle par les motivateurs et les compétiteurs de haut niveau, sont essentiellement des catch phrases qui pourraient vous amener à détester votre sport et même pour certains, arrêter. Alors oui, s’entrainer avec des bêtes de combat, ça vous remet à votre place. « Dans la rue ou en compèt’, on vous fera pas de cadeaux », on est aussi d’accord. Personne n’aime particulièrement se faire ratatiner la gueule sur le tapis, mais si c’est pour la bonne cause et que ça nous permet de progresser, pourquoi pas. Sauf que voilà, on ne progresse pas sur tous les tableaux quand on ramasse non stop pendant les randoris. Certes, on ramasse de moins en moins parce qu’on apprend à défendre, mais notre jeu offensif reste au point mort. Je ne parlerai pas ici des sportifs naturellement doués qui après avoir vu une technique une fois, et après l’avoir drillée pendant deux minutes, sont capables de les enchainer sur n’importe qui sur demande. Non, ici, je parlerai du pratiquant lambda, qui fait du Jiu-Jitsu pour kiffer avec l’idée de progresser tout en sachant que ça ne sera pas simple mais sans vouloir non plus perdre son temps. Avez-vous déjà testé une nouvelle technique, que vous avez découverte à l’entrainement ou sur le net, en rando avec un haut gradé ? Vous l’avez drillée quelques fois, histoire de ne pas trop faire n’importe quoi le moment venu. Etrangement, elle ne marche jamais ou quasiment jamais. Vous mettez trop de temps à la déclencher, et quand bien même vous arrivez à faire ce que vous voulez faire, le gradé aura reconnu votre mouvement et l’aura déjà contré. Vous essayez deux-trois fois, sans succès, et vous vous rendez à l’évidence que ça marche pas puis vous l’abandonnez. Peut-être ne l’avez-vous pas assez drillée ? En même temps, des techniques à driller, vous en avez des tonnes, et les sessions d’entrainement ne sont pas assez longues pour tout incorporer. Driller une technique ne permettra pas de répondre à toutes les problématiques. Les réactions de votre partenaire diffèreront en fonction de sa propre technique et de son physique, donc pour perfectionner votre technique, il faudra la passer en rando, pas le choix. On a déjà statué que le faire sur un gradé, ça ne marchera pas forcément. L’alternative, ce sera de la passer sur un partenaire plus coopératif. Et par coopératif, je veux bien sûr dire, quelqu’un qui ne vous mettra pas la pression du début à la fin et sur qui vous aurez le dessus pour pouvoir enchainer vos mouvements, c’est-à-dire, un partenaire moins gradé ou plus léger. Au début, votre technique passera peut-être, vous ouvrirez votre jeu pour la tenter, et des fois vous vous ferez passer ou renverser. Pas de honte à avoir, même si c’est par une ceinture blanche. Au contraire en fait, ça mettra en lumière les défauts à corriger. Mais vous ne perdrez pas confiance, vous améliorerez les détails, puis vous commencerez à la passer sur des ceintures supérieures, pour éventuellement la passer sur un gradé. Le discours adopté par certains professeurs a pour but de vous motiver et de vous pousser à faire toujours mieux, mettre la barre haute pour que vous donniez le meilleur de vous-même. Sauf que comme démontré au-dessus, il pourrait se montrer contre-productif. Et le pire, c’est qu’ils ne l’appliquent pas forcément eux-mêmes. Par définition, ou par défaut, le prof ou le gradé finira forcément par tourner avec un partenaire moins gradé, sur lequel il pourra tranquillement tester de nouvelles techniques et les améliorer, sans avoir à le faire sur d’autres gradés sur qui elles ne marcheront pas au début. Alors oui, pour se tester, il faudra passez par la case « je me fais lessiver sur le tapis », mais cette étape ne doit pas être la seule dans votre parcours. Ne tourner qu’avec les gradés ou des beaucoup plus forts que soi, c’est l’assurance de perdre toute votre confiance dans votre technique et n’améliorer que votre défense. Pour être le meilleur, il faut s’entrainer avec les meilleurs, mais pas seulement avec les meilleurs.
Par Daniel Marron, jits.fr
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